Cours de dessin dans une classe d’école primaire. Un enfant s’ennuie, regarde la feuille que son voisin met tant de soin à recouvrir de couleur. Le voisin, ça se voit, « l’est pas là pour rire ». Il a passé un temps fou à faire les contours au crayon, pas trop fort pour que ça ne se voit pas, il gomme frénétiquement dès qu’il dépasse…
En plus, c’est comme s’il voulait faire rentrer la Création tout entière sur une page A4 : il y a tout mis ; sa maman, son papa, une girafe et même, dans le coin en haut, un hélico. J’vous jure ! Un peu de jalousie, un rien d’énervement, un soupçon de… bêtise ? L’enfant va décider de ‘malencontreusement’ faire tomber son pot de peinture sur le joli dessin de son voisin.
Cette scène est bien connue des instituteurs de par le monde, immanquablement suivie de l’expression atterrée du voisin et de l’explication indifférente de l’enfant à qui tous demandent pourquoi il a sciemment détruit l’œuvre de son compagnon de classe. Souvent, la réponse se résume à : « J’aimais pas son dessin ». Ah, ben dans ce cas…
Bien sûr, les raisons de ces actes d’enfants sont facilement compréhensibles, et les coupables s’en veulent souvent pendant longtemps, mais face aux récents actes de vandalisme sur des œuvres d’art dans différents pays d’Europe, quelle explication peut-il bien y avoir ? En septembre, les Romains se sont réveillés un matin en apprenant qu’une des fontaines de leur Piazza Navona avait été attaquée, tout comme la Fontaine de Trevi et le Colisée, dans lequel un homme a été arrêté alors qu’il creusait un trou, les poches remplies de pierres. En Angleterre cet été, ce sont deux œuvres de Poussin qui se sont vues aspergées de peinture rouge par un touriste français qui, le plus calmement du monde, discourait des raisons (peu claires) de son acte devant des visiteurs médusés. Disait-il, lui aussi, qu’il « n’aimait pas le dessin » ?
L’art et le vandalisme se sont si bien entremêlés au cours des dernières décennies que plus personne ne semble savoir quelle attitude adopter face à ces gestes ambigus. Après tout, de nombreux artistes se copient en forme d’hommage, ajoutent leur touche personnelle à une œuvre existante, ou détruisent celle-ci sous le couvert de « l’Art pour l’Art ». Ainsi, le détournement et les citations, références et contre-références n’ont pas de fin, comme le montre la ‘performance’ de l’artiste Pierre Pinoncelli qui en 2006 au musée Beaubourg à Paris, défigura au marteau l’Urinoir de Duchamp, œuvre elle-même contestataire de l’art établi.
Les taggeurs et autres graffeurs offrent souvent aux critiques l’occasion de raviver le débat entre art et vandalisme. Pourtant, certains d’entre eux prouvent à quel point leur démarche est artistique, et par leurs moyens d’exhibition, arrivent à nous surprendre sans nous offusquer. Le célèbre Banksy, graffeur anglais, est par exemple parvenu à accrocher ses toiles dans les plus grands musées du monde, à l’insu des gardes de sécurité mais sans aucun dégât ni acte de violence. Aujourd’hui, il est exposé (de manière légitime) dans toute la planète, et les peintures dont il couvre les murs à la sauvette font tripler en une nuit la valeur de ceux-ci.
Peut-être est-ce là la différence entre contestation créative et destruction gratuite ? Les graffitis et les détournements artistiques d’icônes du pouvoir ou de l’ordre, qu’il s’agisse du ‘relookage’ d’ex-monuments soviétiques ou d’insertion facétieuses de ‘fausses’ stations de métro sur les cartes des villes par quelques poètes dessinateurs, semblent rarement avoir pour but de détruire à jamais des traces soigneusement gardées du passé. Ils ne sont que l’expression de créativités dans un monde qui avance, qui devient plus souple.
Rien à voir, donc, avec l’apparition d’un hurluberlu qui a réussi à pénétrer avec une hache ou une bombe de peinture dans l’un des derniers lieux qui avait encore un semblant de calme et de civilisation, pour démanteler un tableau. Ces actes répétés ont déjà rendu les musées et collectionneurs privés du monde entier réticents à confier leurs œuvres à d’autres musées pour des expositions temporaires, ce qui me donne encore un flashback beaucoup plus déplaisant du temps de l’école : parce qu’un seul idiot avait trouvé malin de coller son chewing gum sous chacun des bancs de la classe, chaque jour de l’année, l’institutrice horrifiée, le mois de juin arrivé, décidait de punir toute la classe et de nous priver de la dernière récré de l’année… Vraiment pas juste !
Peut-être les vandales si peu inspirés des mois derniers bénéficieraient-ils d’un petit rappel d’une règle d’or qui ne fait pas de mal. Attention, c’est de la haute philosophie, je vous préviens : « si le dessin ne te plaît pas, t’as qu’à pas le regarder ! » Non mais !
A. Louette – Rédactrice TRIBUNES ROMANDES
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