1- Emma Mylan, vous entrez au Palais Mascotte en 2008, écrivez et réalisez plus de 1000 spectacles en 2 ans. Puis, en 2010, vous créez la première compagnie de spectacles new burlesque en Suisse romande et en 2011, vous ouvrez une école du burlesque à Genève (Secret Follies Boudoir). Alors qu’est-ce que le burlesque ?
Le burlesque existe depuis 1850. A l’époque, il s’agissait de spectacles comiques. Un jour, un directeur de spectacles a eu l’idée d’inclure entre chaque tableau comique des filles qui se dénudent. Ces filles se sont également appelées « burlesque ».
Au fil des représentations, ces danseuses épicées s’inspirèrent des comédiens décalés, elles ajoutèrent dans leur numéro de la comédie, de la parodie, voire même des actes politiques. Entre 1950-1990 le burlesque disparut complètement avec l’avènement de la pornographie et de la libération sexuelle. Puis, après les années 90, avec internet, les publicités porno chic,… les femmes devinrent nostalgiques d’une époque où les choses étaient plus élégantes et plus suggérées. C’est le retour du new burlesque. Il est composé de 3 éléments : un élément féminin, un élément rétro et un élément comique. On peut utiliser un seul ou les 3 éléments en même temps. Certaines fois cela peut être également très engagé et politique.
2- Quelle est la différence entre les cours à la mode de striptease et de lap dance et ceux de burlesque ?
Le burlesque n’a pas un but sexuel, les deux autres oui. Dans les spectacles, il y a très peu d’effeuillage. Il y a de la magie, des chansons, de la danse et des claquettes et des numéros de cirque et deux ou trois numéros d’effeuillage. Tout est burlesque à partir du moment où l’ensemble du spectacle est décalé et drôle.
3- Avons-nous trop de valeurs moralisantes sur le sujet du corps et du sexe ?
Selon moi, ce n’est pas une question de valeurs. Il y a beaucoup de femmes que je rencontre qui n’ont pas du tout apprivoisé leurs corps. Elles n’ont pas consciences de leur expression corporelle. Elles ne savent pas comment se mouvoir, ni comment se déplacer. Elles ont du mal à montrer une épaule, une cheville, sans parler des parties intimes. A l’époque, les femmes portaient des jupes. Elles étaient féminines. Aujourd’hui, se promener en jupe est devenu difficile. Même avec une jupe en dessous du genou. C’est l’évolution de la société en général. Elle nous a apporté beaucoup à nous les femmes. Cependant, aujourd’hui, une jeune fille, dans son contexte familial, scolaire, sociétal, ne souhaite pas forcément être l’égal de l’homme. Elle souhaite juste être une jeune fille. Et dès qu’elle essaye d’être une fille, on la regarde comme si elle faisait une démarche sexuelle au lieu de comprendre que cette expression est simplement une démarche de sa féminité.
4- Qu’est-ce que vous entendez par : « Toutes les femmes sont belles quand elles s’aiment » ?
Il n’y a pas qu’un seul modèle de beauté. Les standards de beauté sont créés par la mode. C’est dommage qu’il n’y ait qu’un modèle de beauté à atteindre : il faut être jeune et mince. C’est un vrai plan marketing, plus les gens sont frustrés, plus ils sont tristes, plus ils consomment. Mais moi, la réalité, je l’adore. Et la réalité elle est dans le spectacle. La scène est une belle métaphore de la vie. Cinq à six filles passent devant vos yeux et elles sont toutes avec des formes pas forcément standards. Elles sont toutes jolies et belles. Et le secret de leur beauté, c’est la confiance qu’elles ont en elles.
5- Vous avez dit lors d’une émission de télévision : « Etre féminine, c’est être une femme épanouie. La féminité ce n’est pas seulement l’esthétique, le paraître, c’est aussi l’Etre. » Qu’est-ce que l’Etre pour vous ?
Etre bien avec soi-même. Que les femmes que je rencontre soient épanouies. Il y a plein de blocages et des barrières que l’on développe à travers le temps. Par la danse, le chant, l’art scénique, on arrive à une forme de développement personnel. Jouer une pin-up est ludique, mais cela agit aussi profondément en nous.
6- Le désir et la passion, sont-ils importants dans les relations humaines ? Qu’est-ce que le mot « fidélité » évoque pour vous ?
Le mot passion est très important. J’en ai toujours vécu. J’ai de la chance de vivre ma passion à fond. La vie est faite pour être vécue et croquée à pleines dents. Même si parfois on prend des risques. Parfois, je me sens comme une trapéziste sans filet. Le cœur bat. Les concessions se font naturellement, mais il y a des prises de risque. Il faut oser. Oser. C’est comme oser être soi-même ; ce n’est pas facile. Je trouve que ça vaut tellement le coup. Il faut juste faire le pas. Je suis comme je suis. Je suis née comme ça. Je ne peux pas être un homme ; je suis une femme. Je ne changerai pas. C’est faire la paix avec soi-même au lieu d’essayer de ressembler à quelqu’un d’autre.
Quant à la fidélité. C’est aussi important pour moi. Il faut être fidèle à soi-même. Je suis autodidacte. Dans la vie si on peut compter fort sur soi-même, on a un allié d’enfer. Au sein des relations personnelles, j’emploierais le mot « honnêteté ». C’est essentiel de tout dire. Souvent, on ne se dit pas tout par politesse et par peur de blesser les autres.
7- Très élégante, vous êtes vêtue d’une robe longue vintage rouge avec des fleurs blanches le tout accompagné d’un rappel de rouge dans vos cheveux grâce à une jolie fleur. Est-ce que le regard des autres vous importe ou vous touche ?
J’y suis habituée. J’aime que l’on me remarque, que l’on me dise un mot gentil. Parfois ça me fait rire aussi de provoquer un peu les gens. Je ne suis pas contre le regard, au contraire. Sauf les regards déplacés. Il faut oser. Le vide attire le vide, si on ne met pas de couleurs dans cette vie, il n’y en aura jamais. Par contre, ce qui est gênant, ce sont les gens qui n’ont pas d’éducation. D’ailleurs, il y en a de plus en plus. Quand j’entends un mauvais mot à mon égard, je n’arrive pas à baisser la tête, ni à feindre l’indifférence, au contraire, c’est cautionner et donner raison aux mauvaises manières. Il faut continuer à protéger le savoir-vivre à Genève. A Zurich, je retrouve quelque chose de différent, de plus authentique.
8- Pour quelles raisons avoir choisi Genève pour monter votre école et non pas Paris qui semble plus ouverte ?
C’est Genève qui m’a choisi. En tant qu’indépendante, j’avais des contrats dans toute l’Europe, parfois en Suisse. Puis, on m’a proposé de venir m’installer ici. Travailler dans un cabaret, c’était un rêve de petite fille. Les choses se sont faites comme ça…
9- Quel bilan tirez-vous de cette année d’enseignement ?
Une année merveilleuse. Je ne m’attendais à rien. Au final, c’est une aventure humaine très intense et positive. Je communique beaucoup avec le corps, hors de la discussion. Faire des choses ensemble crée des liens très forts. Je crois que les gens ont besoin de sentir leur cœur battre. Le sentir battre très fort. A Secret Follies Boudoir, je les aide dans ce sens. Sur mon site internet, vous pourrez retrouver des témoignages de participantes. Lorsqu’une fille monte pour la première fois sur une scène son cœur bat fort. Oser. Oser s’écouter. Faire ce que l’on a au fond de soi. Oser affirmer ce que l’on est au fond de soi. Certaines ont vraiment vécu de réelles métamorphoses dans leur existence grâce à cette école.
J’ai eu une cinquantaine d’élèves âgées de 16 à 70 ans. Je ne leur apprends pas à devenir des artistes, je leur apprends à développer leur féminité dans leur vie quotidienne. A la fin de l’année, un spectacle clôture nos cours. Au Lido de Lausanne, lors de ce spectacle, je n’ai jamais entendu autant d’éclats de rire, des personnes criaient littéralement de joie.
10- Et maintenant qu’allez-vous créer ?
L’école va continuer évidemment. Mais ma petite voix intérieure me dit qu’il est temps d’écrire et de produire un spectacle. Bien sûr, toujours à travers le new burlesque. Je souhaite offrir au public ma vision du monde sur une scène de théâtre ou de cabaret.
Interview réalisée par Nicolas-Emilien Rozeau – Chroniqueur pour le magazine Tribunes Romandes & Ecrivain
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